Le CARDH se prononce sur les régimes de sanctions des États-Unis, du Canada et du Conseil de sécurité pour contenir la criminalité en Haïti

Le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme (CARDH) a publié un rapport le 21 novembre 2022 portant sur les régimes de sanctions des États-Unis, du Canada et du Conseil de sécurité pour contenir la criminalité en Haïti : contexte géopolitique, résultats, enjeux et perspectives. Dans ce rapport le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme (CARDH) dit vouloir contribuer à une meilleure compréhension de la portée bilatérale et multilatérale, des conséquences et des limites des régimes de sanctions et plaide pour que les sanctions aider à combattre la corruption, à assainir les finances publiques, à récupérer le fonds PetroCaribe.

L'ouragan des régimes de sanctions des États-Unis, du Canada et du Conseil de sécurité pour contenir la criminalité en Haïti a provoqué un déchaînement de réactions dans les médias sur le plan national et international. Le CARDH sort de son silence en s'exprimant à travers un rapport. Dans ledit rapport, le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme a exposé la dégradation intensifiée de la situation socio-économique et politique que connaît le pays. Le CARDH rappelle: « à partir de novembre 2018, les violences des gangs se sont particulièrement augmentées et systématisées : massacres suivis de viols collectifs,  kidnapping (pour l’année 2021, la Cellule d’observation de la criminalité (COC) du CARDH a recensé 1009 enlèvements contre 796 en 2020. 755 cas sont déjà recensés pour les trois trimestres de 2022.) prise d’otage de la population dans les quartiers populaires servant de bouclier aux gangs… »

 

Le CARDH  a déploré : « cette situation a provoqué une crise humanitaire et un quasi-dysfonctionnement de la société : résurgence de l’épidémie de choléra (au 10 novembre, le ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP) rapportait 7 212 cas suspects, 700 cas confirmés et 142 décès à travers le pays. Haïti connaît une flambée de choléra avec une augmentation de 72 % des cas suspects entre le 3 et le 11 novembre.) Des patients meurent dans les hôpitaux, augmentation en moyenne de 30 % des prix des produits de consommation de base, non-réouverture des écoles… Cette réalité a été renforcée par une série de manifestations politiques violentes exigeant le départ du Premier ministre Ariel Henry. »

Le CARDH explique : « face à cette situation de violations graves et systématiques des droits humains qui impose une responsabilité d’intervenir, la coopération internationale, se basant sur le droit international notamment la responsabilité de protéger (préambule, articles 1er, 2, 24, 25, 55, 56 de la Charte des Nations unies) ouvrant la voie à l’adoption de régimes de sanctions contre les chefs de gangs et leurs supporteurs (politiques, personnalités du secteur économique…) »

 

 

Le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme précise » « Pour mieux comprendre la nouvelle dynamique de sanctions de la coopération internationale contre les gangs en Haïti et ceux qui les soutiennent (financements et autres), il serait important de souligner le double contexte bilatéral et multilatéral amenant à cette nouvelle stratégie : de l’adoption de la Résolution 2645 du 15 juillet 2022 portant sur le renouvellement de la mission onusienne en Haïti (BINUH), en passant par la 77e session de l'Assemblée générale des Nations unies, à la Résolution du 21 octobre 2022 du Conseil de Sécurité instaurant un régime de sanctions pour réprimer la violence des gangs en Haïti ».

D'une part, le Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme a fait savoir au plan bilatéral, l’adoption d’un régime de sanctions a des avantages et des limites. En effet, « les régimes de sanctions adoptés au plan bilatéral ont des effets immédiats. L’État qui les adopte, les applique tout simplement. Par exemple, en fonction des antécédents, d’informations dont ils disposeraient à partir de leurs mécanismes (DEA, système bancaire) ou d’autres motivations, les États-Unis et le Canada décident conjointement de commencer d’appliquer les régimes de sanctions contre des politiques et des personnalités du secteur économique qui auraient financé les activités criminelles en Haïti. Cependant, ces sanctions sont non imposables aux autres États et à la coopération internationale.

D'autre part, ce rapport a également exposé les avantages et limites sur le plan multilatéral: « les sanctions adoptées au plan multilatéral sont opposables à la coopération internationale dans son ensemble. Les sanctions qui seront adoptées par les Nations unies seront suivies par tous les États y compris les organisations régionales (OEA, UE, UA).  Les personnes sanctionnées ne pourront pas voyager, leurs fonds seront gelés partout sur la planète ». Cependant, le processus de mise en œuvre des régimes de sanctions au plan multilatéral est plus long et complexe, pouvant se heurter à des enjeux politiques, économiques et autres. D’abord, il faut former un comité avec les membres du Conseil de sécurité pour enquêter sur le terrain et produire un document qui sera opposable à la communauté des États. 

Le CARDH soutient : « au-delà de leur portée morale et politique, les régimes de sanctions doivent viser, entre autres : la réforme du système politique du pays, la réorganisation du système électoral et l’assainissement des finances publiques; la lutte contre la corruption particulièrement le retracement du fonds Pétrocaribe; le renforcement et la standardisation du système judiciaire haïtien afin qu’ils tiennent compte des principes de l’État de droits consacrés par les principaux instruments internationaux et régionaux de protection de droits humains. En effet, la justice et la politique américaines et canadiennes ne doivent pas remplacer la justice haïtienne, elles doivent s’inscrire dans une logique de complémentarité et se conformer au droit international. 

 

 

 Naïma Michel

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