La suspension de la subvention des produits pétroliers ne rend pas service à l’économie

L’ajustement du prix des produits pétroliers a immédiatement provoqué une large augmentation du coût des produits de première nécessité sur le marché ; soit une misère beaucoup plus atroce dans le pays. Dans le contexte actuel où l’insécurité a déjà appauvri des centaines de familles et laissé des séquelles énormes dans l’économie, des techniciens du ministère de l’Économie et des Finances ainsi que de la Primature avaient conseillé au Premier ministre Ariel Henry de faire un recul sur la décision d’ajuster le coût de l’essence. De fait, ils étaient pour une application graduelle de cette mesure, mais aussi pour la mise sur pied de programmes sociaux en vue d’accompagner les personnes les vulnérables de la population.

L’ajustement des prix du carburant et la fixation des prix du transport en commun ont généré des controverses au sein de l’opinion publique et de la classe politique. Certains voient d’un mauvais œil la décision du gouvernement de majorer les prix de l’essence dans un contexte socio-économique et politique assez fragile. « La situation de vie de nos compatriotes est trop misérable. L’inflation au niveau mondial garde ses conséquences sur l’économie haïtienne. La guerre russo-ukrainienne a diminué les importations et augmenté les prix des produits. Ce n’est pas le bon moment de suspendre la subvention du carburant, a soumis Judelane, une Haïtienne de la diaspora.

 

Pour sa part, l’économiste Eddy Labossière avait déjà prévu une situation d’hyperinflation dans le pays en cas d’augmentation du prix des produits pétroliers sur le marché ». La situation d’insécurité alimentaire va s’empirer. Des entreprises seront obligées de renvoyer leurs employés, la situation instable du pays rend impossibles les investissements, la fluctuation du dollar et tant d’autres facteurs vont déstabiliser l’économie du pays », a-t-il soumis. De fait, c’est une décision prise à la volée, sans aucune considération technique et réelle par rapport aux divers besoins de la population, que le Premier ministre a pris, a ajouté l’économiste.

 

Parallèlement, une source proche de la Primature, qui n’a pas voulu s’identifier, a révélé qu’ils ont expliqué au Premier ministre que toute subvention drastique de prix du carburant aurait une conséquence directe sur l’économie. Nous avons prévu une situation catastrophique, avec une hausse des produits de première nécessité et des services, une augmentation du taux de l’inflation, l’assujettissement de plus de 250 000 personnes supplémentaires à la misère et une forte progression de l’insécurité alimentaire sur tout le territoire », a confié cette même source. Cependant, le chef du gouvernement n’était pas intéressé à évaluer les problèmes pour donner une vraie réponse aux divers cris de la population. Il a pris des décisions en fonction de ses besoins politiques de manière instantanée. 

 

Gregory, un chauffeur de taxi moto, soutient que l’ajustement du prix des produits pétroliers dans les pompes a considérablement modifié son rythme de dépenses quotidiennes. « Il me fallait 750 gourdes pour remplir le réservoir de ma moto, aujourd’hui, il me faut plus de 1500 gourdes alors que les revenus et les activités ont totalement diminué dans le contexte de la crise actuelle. Le PM Ariel Henry est sans pitié pour nous les plus vulnérables, il n’a pas agi comme un dirigeant du peuple », a-t-il réagi.

Au niveau des ménages, les réactions sont identiques. Plusieurs couches de la population se sentent lésées par rapport aux agissements du chef du gouvernement. Entre autres, des parents ne font que constater le fait que leurs enfants soient obligés de rester enfermés à la maison, sans un accès aux différentes activités académiques. En parallèle, ils font face à l’insécurité. Les bandits font leurs lois dans plusieurs quartiers de la zone métropolitaine et dans les villes de province. Néanmoins, l’ajustement du prix des produits pétroliers est un excès du pouvoir en place pour provoquer un éclatement social dans le pays, a fait savoir Marjorie, une riveraine de la commune de Delmas.

 

Le pays est en récession économique depuis près de 4 ans. Le gouvernement a déclaré ouvertement qu’avec la subvention des produits pétroliers, des actions à portée sociale, comme la construction d’hôpitaux et d’établissements scolaires ne seraient jamais possibles. Pour sa part, Marjorie assure que seules une volonté manifeste et la mise en place de mesures valables peuvent freiner la crise endémique qui perdure dans le pays. En ce sens, la stabilité ou l’anarchie, tout dépend du pouvoir en place.

 

Oberde Charles

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