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Agriculture, alimentation, santé publique... soyons rationnels

Repenser la narration de la crise de la santé des abeilles liée aux pesticides – aux néonicotinoïdes : pourquoi les médias se trompent

11 Janvier 2018 , Rédigé par Seppi Publié dans #Abeilles, #Pesticides, #Néonicotinoïdes

Repenser la narration de la crise de la santé des abeilles liée aux pesticides – aux néonicotinoïdes : pourquoi les médias se trompent

 

Jon Entine*

 

 

 

 

Les abeilles sont-elles en danger en raison de l'utilisation d'insecticides, et en particulier de la classe de produits chimiques connus sous le nom de néonicotinoïdes, qui sont utilisés sur de nombreuses cultures ?

 

C'est un débat qui se joue dans les laboratoires de recherche et dans les médias depuis une décennie, depuis que le phénomène du syndrome d'effondrement des colonies d'abeilles (Colony Collapse Disorder) a ébranlé l'industrie apicole en Californie et ailleurs en Amérique du Nord, et en Europe, à partir de 2006-7.

 

Inutile de signaler à ceux qui ont suivi la controverse des néonics que c'est une question hautement politisée. La plupart des acteurs de ce débat, notamment les entomologistes, les agriculteurs et les apiculteurs, ont vraiment du mal à comprendre les facteurs complexes qui expliquent pourquoi les abeilles sont confrontées à de nombreux problèmes, des attaques du tueur Varroa destructor et de la sur-utilisation des acaricides pour le tuer à l'utilisation généralisée de pesticides agricoles. Mais dans les médias et dans le cyberespace, l'hyperbole et l'idéologie ont éclipsé la discussion rationnelle et bouleversé le rythme parfois laborieux de la science. Le débat très émotionnel oppose maintenant les activistes, y compris certains scientifiques militants, à l'industrie agrochimique et à de nombreux scientifiques qui considèrent que les néonicotinoïdes sont une force motrice relativement mineure dans les problèmes de santé auxquels sont confrontés les abeilles et les bourdons.

 

L'une des ressources que les médias ont souvent considérée comme une source objective est le Bee Informed Partnership (BIP**), un projet du Département de l'Agriculture des États-Unis établi en coopération avec l'entomologiste Dennis vanEngelsdorp de l'Université du Maryland. Chaque année, au printemps, il publie une estimation annuelle des pertes de ruches aux États-Unis. Il semble que chaque année, le rapport encadre le débat sur l'accélération ou la diminution de la « crise des abeilles ».

 

 

Médias c. science ?

 

Au cours des dernières années, le récit populaire parmi les journalistes et sur Internet a été que les abeilles domestiques et sauvages font face à une catastrophe imminente – elle a été surnommée abeillecalypse ou abeimageddon, la colère s'étant essentiellement concentrée sur une classe de pesticides, utilisée principalement en enrobage des semences, connue sous le nom de néonicotinoïdes. Ces insecticides ont été introduits dans les années 1990, en grande partie pour remplacer des produits chimiques qui nuisaient manifestement aux abeilles et posaient également des risques pour la santé humaine.

 

La santé des abeilles est une véritable préoccupation. Après tout, elles sont transportées par camion d'une ferme à l'autre comme des animaux (insectes) d'élevage. Et les entomologistes et l'USDA disent que l'acarien Varroa destructor a infesté les ruches à un rythme accéléré au cours des dernières décennies et constitue une menace sérieuse et continue. Selon la plupart des entomologistes, les pesticides sont peu susceptibles de causer des problèmes de santé chez les abeilles, mais ce n'est pas ainsi que le problème a été abordé dans les médias et sur la toile.

 

Les militants anti-pesticides ont longtemps rejeté les conclusions des agences gouvernementales et des scientifiques, décidant que les problèmes de santé des abeilles ne pouvaient pas être motivés par quelque chose d'aussi prosaïque qu'un parasite bien connu ; ils se sont donc concentrés sur les néonicotinoïdes.

 

La question du rôle relatif des néonics dans la santé des abeilles est fascinante en raison de la scission de la science – certaines études en laboratoire concluent à des problèmes potentiels sérieux liés à un ou plusieurs néonicotinoïdes, mais la recherche sur le terrain ainsi que les méta-analyses et les chiffres bruts – le nombre des ruches atteint des records au niveau mondial – racontent une histoire très différente.

 

La publication des statistiques du BIP sur la mortalité est devenue un rituel printanier suivi de près par ceux qui se sont investis dans le récit de l'abeillecalypse ; les années où ils ont été élevés, les médias ont généralement considéré les chiffres des pertes du PIB comme la confirmation du fait que la catastrophe est enfin arrivée. Les militants remplissaient la chambre d'écho des réseaux sociaux avec des blogs alarmistes, qu'ils utilisaient souvent comme support pour la collecte de fonds ou des campagnes anti-pesticides.

 

Mais les résultats de l'enquête de l'année la plus récente ne soutiennent pas vraiment ce récit. Les pertes hivernales, lorsque les abeilles font face à des menaces graves liées au temps froid, ont été de 21,1 %, le chiffre le plus bas des dix années d'existence de l'enquête. Pris ensemble avec les résultats des années précédentes, le chiffre de 2016-2017 poursuit une tendance à la baisse des pertes hivernales qui, sur la trajectoire actuelle, atteindra l'objectif de 15 % fixé dans la Stratégie Nationale des Pollinisateurs d'ici 2024.

 

 

 

 

Cependant, il y a sept ans, le BIP a commencé à recueillir aussi des réponses à des enquêtes sur les pertes de ruches en saison (en été). Mais combiner les pertes en saison et en hiver peut se traduire par un chiffre de mortalité alarmant et spectaculairement trompeur. Par exemple, en 2016, il a été de 44 %, ce qui donne à penser que près de la moitié des abeilles américaines sont mortes, et c'est précisément ce que la plupart des médias ont rapporté.

 

Pour la dernière année de référence, 2016-17, le résultat combiné a été plus faible : 33,2 %. C'était le deuxième plus bas des sept années de statistiques combinées, mais c'était toujours l'occasion de faire des unes de journaux apocalyptiques : « A third of the nation's honeybee colonies died last year » (un tiers des colonies d'abeilles domestiques sont mortes l'année dernière), a ainsi titré USA Today. Le Time, qui a publié un article intitulé « A World Without Bees » (un monde sans abeilles) – un article critiqué par de nombreux scientifiques – est resté fidèle à sa ligne, en titrant : « Honeybee Deaths Are Down, But the Beepocalypse Continues » (la mortalité des abeilles est en baisse, mais l'abeillecalypse continue).

 

 

Pas d'abeillecalypse

C'est du journalisme superficiel. Bien que le nombre de pertes combinées du Bee Informed Partnership suscite l'attention des médias, il fournit une image très superficielle de la santé des abeilles, et les chiffres eux-mêmes sont facilement manipulés pour correspondre à un récit. Il y a trois raisons principales à cela.

 

La première raison est que les macro-statistiques sur la population totale des abeilles racontent une histoire différente de celle des chiffres du BIP. L'année précédente, quand il a été rapporté qu'« un tiers des colonies d'abeilles de la nation sont mortes », la population d'abeilles américaines avait atteint son plus haut niveau depuis 22 ans. L'histoire occultée dans les médias populaires, bien que rapportée sur des sites scientifiques tels que Genetic Literacy Project et sur les sites spécialisés universitaires et apicoles, est qu'en dépit de quelques hauts et bas, le nombre de colonies d'abeilles est resté remarquablement stable depuis le milieu des années 1990, lorsque les néonicotinoïdes ont été introduits.

 

Il s'est situé autour de 2,5 millions de ruches aux États-Unis, même lors de la crise du syndrome d'effondrement des colonies de 2006 à 2010, avec une croissance significative du nombre de ruches au cours des cinq dernières années. Il y a eu en effet une forte plongée dans le nombre de ruches américaines dans les années 1980 et au début des années 1990, lorsque l'acarien Varroa a envahi les États-Unis, mais ces baisses se sont stabilisées et ont fini par s'inverser. Les chiffres globaux ont été stables ou en hausse au Canada, en Europe et sur tous les continents sauf l'Antarctique (où il n'y a pas d'abeilles), au cours des 20 dernières années – durant toute la période durant laquelle les pesticides néonicotinoïdes ont été commercialisés.

 

 

 

Rapport annuel de l'USDA sur les colonies productrices de miel aux États-Unis (l'USDA publie ses statistiques finales un an après les estimations préliminaires) ; Canada ; Mondial / FAO 1 / FAO 2

 

 

Selon les statistiques gouvernementales, la population mondiale d'abeilles évolue de manière positive depuis plus d'un demi-siècle. Entre 1995 et 2014, nous avons observé les augmentations suivantes des populations d'abeilles :

 

Amérique du Nord : + 8 %

Europe : + 10 %

Afrique : + 19 %

Amérique du Sud : + 43 %

Asie : + 43 %

Océnie : + 30 %

 

Malgré ces tendances à la hausse, les reportages alarmistes et l'écho des réseaux sociaux des ONG ont triomphé en Europe, où les politiciens ont mis de côté les conclusions des entomologistes et semblent se préparer non seulement à prolonger leur interdiction « temporaire » de trois néonicotinoïdes de 2013, mais à l'étendre à presque toutes les utilisations, même sur les cultures que les abeilles ne visitent jamais. Les mêmes groupes activistes – et bien sûr les médias – continuent d'exercer une énorme pression politique aux États-Unis pour qu'ils emboîtent le pas. Jusqu'à présent, l'EPA semble résister, comme le suggèrent ses récentes évaluations des trois néonics les plus vendus, mais de nombreux observateurs proches de l'agence pensent que le processus a été actif depuis un certain temps.

 

 

Comment et pourquoi les abeilles meurent naturellement et les apiculteurs reconstituent leurs cheptels

 

Un nouveau rapport du Bee Informed Partnership sera publié dans quelques mois. Il sera intéressant de voir si les journalistes feront la distinction entre les pertes de colonies d'abeilles saisonnières normales subies par les apiculteurs, qui ont été un phénomène normal dans l'apiculture depuis des temps immémoriaux, et les tendances générales de la population.

 

Les abeilles se reproduisent très rapidement – la durée de vie normale d'une abeille ouvrière pendant les mois d'été est de seulement six semaines – et les apiculteurs peuvent ainsi reconstituer leurs ruches très rapidement. Il n'y a pas si longtemps, de nombreux apiculteurs des latitudes septentrionales, particulièrement au Canada, où le froid intense rend difficile la survie des abeilles en hiver, vidaient leurs ruches, récoltaient tout le miel et recommençaient le printemps suivant avec de nouvelles reines et des paquets d'abeilles achetés. Ils s'auto-infligaient un taux de perte de 100 %. Mais ils avaient des populations d'abeilles saines et prospères tout au long de l'été et une activité apicole stable et prospère.

 

Les pertes de colonies, qu'elles soient hivernales ou printanières, représentent un coût économique pour les apiculteurs et peuvent fournir des indices sur la santé globale de la ruche. Mais les chiffres que nous voyons ces dernières années ne présagent pas de calamité. En fait, ils peuvent monter et descendre avec peu d'effet sur le nombre total de ruches dans le pays ou dans le monde – qui est presque entièrement déterminé par le nombre de colonies d'abeilles que les apiculteurs décident d'« élever ». Et ceci est largement déterminé par des considérations économiques – le prix du miel ou le taux en vigueur pour les services de pollinisation.

 

De façon prévisible, cependant, à chaque fois que le Bee Informed Partnership publie son chiffre de pertes annuelles qui attire l'attention, les médias prophétisent une catastrophe. Une analogie approximative pourrait être celle d'une enquête boursière qui ne rapporterait que les actions qui ont subi des pertes à un moment donné au cours de l'année, sans prendre la peine de mentionner que, dans l'ensemble, le marché a été stable ou en hausse.

 

On pourrait faire valoir qu'il n'est pas de la responsabilité du BIP de s'assurer que les médias n'interprètent pas incorrectement ses statistiques ou ne les utilisent pas de manière abusive. D'accord. Il ne fait aucun doute que Dennis vanEngelsdorp, qui a lancé le BIP, est une personne qui se dévoue pour le bien-être des abeilles et des apiculteurs. C'est vanEngelsdorp, avec un co-auteur, qui a mené la première recherche sur la disparition mystérieuse des abeilles ouvrières de la ruche, un phénomène qu'ils ont dénommé Colony Collapse Disorder, syndrome d'effondrement des colonies, et il a été l'un des principaux chercheurs étudiant les nombreuses maladies affectant les abeilles aujourd'hui.

 

Tout cela, cependant, met simplement en relief les problèmes avec l'enquête sur les pertes de colonies. Tout scientifique – et aussi tout journaliste scientifique compétent – examinant de près la méthodologie du BIP devrait constater qu'elle souffre de nombreuses limitations, et que certaines d'entre elles sont si graves qu'elles font perdre à ses résultats pratiquement toute signification en tant que référence pour l'état réel des populations d'abeilles.

 

 

Toutes les données sur la santé des abeilles ne sont pas égales

 

Ceci nous amène au second grand problème : les chiffres du BIP sont tirés d'une enquête volontaire, à laquelle la plupart des apiculteurs ne se donnent pas la peine de répondre. En fait, les données du PIB ne représentent généralement qu'une petite fraction de tous les apiculteurs des États-Unis, soit environ 13 % en 2016-2017. Ce serait un échantillon assez grand pour un sondage scientifiquement randomisé, comme ceux auxquels nous nous sommes habitués en politique. Mais le BIP envoie simplement son questionnaire aux apiculteurs et compile les résultats de ceux qui le renvoient. Comme les répondants sont auto-sélectionnés, on pourrait supposer intuitivement que les résultats seront biaisés en faveur des apiculteurs ayant de sérieux problèmes de pertes.

 

Et en effet, cela semble être le cas. La grande majorité des répondants sont des apiculteurs de petite taille ou de passe-temps, et seulement une infime partie des apiculteurs commerciaux (1,4 %) y participent. Il y a en fait beaucoup plus d'apiculteurs amateurs aux États-Unis que d'apiculteurs commerciaux, mais ils représentent une petite fraction de l'ensemble des colonies d'abeilles.

 

Pourquoi est-ce important ? Il est bien connu que de nombreux petits apiculteurs ont les pires problèmes, probablement à cause de l'inexpérience. Ils négligent souvent de traiter contre le Varroa et d'autres maladies et peuvent avoir des pertes beaucoup plus élevées. Mais l'enquête du BIP n'a aucun mécanisme pour redresser ces biais et elle n'effectue aucune analyse des données pour rendre ses conclusions plus représentatives.

 

On le voit aussi clairement dans les énormes disparités régionales. Il y a deux fois plus de colonies d'abeilles à l'ouest du Mississippi qu'à l'est, mais deux fois plus d'apiculteurs à l'est. En d'autres termes, les entreprises d'apiculture sont plus importantes dans l'ouest ; les petits apiculteurs et les amateurs dans l'est. Mais la sur-représentation des répondants d'une région au BIP – ou même de certains États d'une région – peut facilement fausser les résultats. Dans l'enquête du BIP de 2015-16, par exemple, l'Ohio et la Pennsylvanie étaient fortement sur-représentés (certaines colonies de ces États étant également comptées une deuxième fois pour la Floride du fait de la transhumance).

 

Et la nature inégale et irrégulière de l'enquête peut créer d'énormes distorsions. Dans un cas, un seul éleveur de reines de Californie aurait engagé les enquêteurs du BIP à enquêter sur ses opérations en Californie et au Montana – donnant un nombre de données BIP issues de ses seules activités plus de 10 fois plus grand que pour le reste de la Californie. Dans un autre cas au Montana, un seul grand exploitant qui a subi des pertes dévastatrices (par erreur, négligence ou malchance) a fait que le BIP a décrit l'État comme ayant subi de « lourdes pertes », bien qu'aucun des autres apiculteurs de l'État n'eût subi des pertes anormales.

 

Compte tenu des limites de l'enquête du BIP, et en particulier de sa représentation asymétrique de la taille et de la géographie des opérations apicoles, ses conclusions seraient peut-être plus utiles si elles n'étaient pas considérées comme des statistiques nationales sur les pertes d'abeilles – ce qu'elles ne sont pas – mais comme la description des pertes subies par les secteurs de l'industrie apicole qui répondent réellement à l'enquête du BIP.

 

 

D'autres données sur les abeilles aux États-Unis présentent-elles une image similaire et problématique ?

 

Une troisième raison d'être sceptique quant à la valeur de l'enquête du BIP est que nous avons une enquête plus complète menée par le Service National de la Statistique Agricole de l'USDA. Il n'est pas surprenant de constater que la description de la situation des abeilles mellifères est très différente et qu'elle donne une image beaucoup plus dynamique des activités des apiculteurs au cours de l'année. À la différence du BIP, le NASS a construit un échantillon stratifié d'exploitations apicoles avec lesquelles le Ministère a des contacts réguliers, appuyés par des appels téléphoniques et, au besoin, par un dénombrement pour les non-répondants. L'USDA a dressé une carte des pertes de colonies, des colonies ajoutées ou régénérées et des colonies totales d'abeilles mellifères aux États-Unis, par trimestres, du 1er janvier 2015 au 1er mars 2016.

 

Au cours de ces 15 mois, le nombre total de colonies d'abeilles mellifères a fluctué de façon spectaculaire d'un maximum de 3,1 millions à un minimum de 2,6 millions au dernier trimestre de l'enquête, la plupart des trimestres enregistrant plus de 2,8 millions de colonies. Outre les pertes, le NASS a également comptabilisé les ajouts. Par exemple, un total de 662.000 colonies ont été ajoutées et 693.000 colonies ont été « régénérées » rien qu'au cours du deuxième trimestre, d'avril-juin, 2015.

 

En d'autres termes, ce sont des exploitations apicoles normales, dans lesquelles les exploitants décident d'ajouter ou de supprimer des colonies en fonction des conditions du marché (demande et prix, domestiques et à l'étranger, pour différents types et qualités de miel et/ou perspectives de services de pollinisation commerciaux). Il est facile de faire fluctuer le nombre total de colonies d'abeilles mellifères aux États-Unis de près de 20 % sur une période de 15 mois – même si les populations comparées d'année en année sont stables ou en croissance.

 

Cela souligne l'erreur que l'on fait en imaginant que les colonies américaines d'abeilles mellifères sont une sorte de population naturelle soumise uniquement à des déclins causés par des facteurs environnementaux (par exemple les pesticides). Au lieu de cela, État par État et au niveau national, les agriculteurs et les apiculteurs ne cessent d'ajouter, d'ajuster et parfois de réduire délibérément leur nombre de colonies d'abeilles en réponse à des incitations économiques. Les données d'enquête auto-sélectionnées et moins inclusives du BIP doivent être comparées à des données plus complètes de l'USDA pour être considérées dans une perspective appropriée.

 

 

Le défi du Varroa

 

Un résultat heureux de tous ces efforts d'enquête pour évaluer les pertes d'abeilles des dernières années est qu'ils ont mis en relief le problème réel et critique auquel font face les abeilles. C'est l'acarien Varroa – et non les pesticides, et en particulier les néonicotinoïdes qui figurent régulièrement parmi les résidus les moins détectés dans les colonies d'abeilles. Les enquêtes du Bee Informed Partnership de ces dernières années ont correctement mis en évidence le Varroa parasitaire et la douzaine de virus et de maladies qu'il transporte dans les ruches comme la menace numéro 1 pour les abeilles mellifères.

 

L'enquête NASS de l'USDA aboutit à la même conclusion. Il en est de même de l'expérience pratique des apiculteurs en Australie, où il n'y a pas de Varroa, et de l'Alberta, au Canada, où les autorités ont fait de la lutte contre le Varroa la priorité absolue des apiculteurs. Cette conclusion a été encore renforcée par l'étude pluriannuelle de 2016 sur l'incidence des maladies chez les abeilles domestiques co-signée par nul autre que vanEngelsdorp. Elle a trouvé que la prévalence du Varroa (ainsi que du champignon parasite de l'abeille Nosema ceranae) dans les colonies d'abeilles américaines était beaucoup plus grande qu'on ne le pensait auparavant et a identifié ces parasites, avec le virus des ailes déformées (Deformed Wing Virus), comme les principaux fléaux des abeilles aujourd'hui.

 

Alors, pourquoi ne nous concentrons-nous pas sur la lutte contre la menace parasitaire reconnue ? L'une des raisons est que le problème du Varroa est très difficile à résoudre – essayer de « tuer une petite bête sur une petite bête », en gardant l'une d'entre elle intacte, est incroyablement difficile. Cela est d'autant plus vrai que le Varroa a montré une capacité remarquablement rapide à développer une résistance aux différentes méthodes de traitement au fur et à mesure de leur mise en œuvre. D'autre part, les pesticides et les grandes entreprises qui les fabriquent constituent une cible pratique et tentante.

 

Une autre chose qui ressort très clairement de toutes ces enquêtes – que ce soit du BIP, du NASS ou de divers efforts européens est que les abeilles ne sont pas confrontées à une apocalypse ou à une mise en danger sérieuse à la suite d'un empoisonnement aux pesticides.

 

_____________

 

* Jon Entine est le directeur exécutif du Genetic Literacy Project (projet d'alphabétisation génétique). Sa biographie est ici. Twitter : @jonentine.

 

** Partenariat pour être informé sur les abeilles. L'intitulé joue sur l'homophonie de « to be » (être) et « the bee » (l'abeille).

 

Source : https://geneticliteracyproject.org/2018/01/09/rethinking-pesticides-neonicotinoids-bee-health-crisis-narrative-media-get-wrong/

 

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